Projet de loi relatif au Dialogue Social

L’Assemblée Nationale a adopté le Projet de loi sur le Dialogue Social le 2 juin.

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L’Assemblée Nationale a adopté le projet de loi sur le Dialogue Social le 2 juin.

Faisant suite à l’échec des négociations entre les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel en janvier dernier, ce projet de loi rénove le dialogue social selon deux axes principaux : d’une part, il créée de nouvelles institutions ou possibilités de négociations, et d’autre part, il procède à l’aménagement de dispositions préexistantes sur ces sujets.

Nous vous présentons dans cet article deux mesures touchant la représentation des salariés et des employeurs, et la négociation collective  dans les TPE-PME.


I – Aménagements relatifs à la représentation des salariés

La représentation des salariés et des employeurs est développée avec la création d’une nouvelle instance pour les TPE, tandis que, dans le même temps, des modifications sont apportées au fonctionnement des institutions existantes.

A) Création de commissions paritaires régionales interprofessionnelles

Afin que tous les salariés soient représentés « sous des formes adaptées à la diversité des entreprises», le gouvernement a souhaité instituer une représentation universelle des salariés des TPE (moins de 11 salariés). Jusqu’à présent, 4,6 millions de salariés n’étaient pas représentés.

Le texte porte ainsi création de commissions paritaires régionales interprofessionnelles, censées représenter salariés et employeurs des très petites entreprises, à compter du 1er juillet 2017.

 Cette nouvelle institution sera mise en œuvre au profit des branches n’ayant pas elles-mêmes mis en place de commissions paritaires régionales  ou non couvertes par les commissions instituées par un accord national multi-professionnel.

 Composition

Dans chaque CPRI, dix sièges seront attribués d’une part aux organisations syndicales de salariés et d’autre part aux organisations d’employeurs à vocation interprofessionnelle, et répartis proportionnellement à leur audience (définie par le nombre d’adhérents dans la région et les branches couvertes par la commission). A titre transitoire, jusqu’au 1er juillet 2021, l’audience patronale retenue sera celle mesurée au niveau de l’ensemble des entreprises dans la région et les branches couvertes par la commission. Pour le renouvellement des commissions après cette date, l’audience devrait être complètement ajustée pour ne prendre en compte que les entreprises adhérentes de moins de 11 salariés. Par ailleurs une parité hommes-femmes sera imposée au sein de ces commissions. Le mandat sera de 4 ans, et renouvelable.

 Compétence

Ces commissions régionales seront chargées d’informer et de conseiller les salariés et les employeurs des TPE sur les dispositions légales ou conventionnelles applicables (notamment, en droit du travail). Elles apporteront des réponses et des services concrets aux salariés rencontrant des difficultés ou ayant besoin d’accompagnement.

Par ailleurs, elles informeront, débattront et rendront des avis sur les problématiques spécifiques aux TPE, notamment en matière d’emploi, de formation, de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, des conditions de travail et de santé,  du temps de travail.

Elles pourront, au titre de ces missions, se rendre dans les locaux de l’employeur, avec son autorisation préalable.

Elles auront également pour rôle de faciliter la résolution de conflits individuels ou collectifs n’ayant pas donné lieu à saisine d’une juridiction. La commission ne pourra intervenir qu’avec l’accord des parties concernées.

Elles feront par ailleurs des propositions en matière d’activités sociales et culturelles.

Elles n’auront en revanche pas de rôle de négociation.

 Fonctionnement

Les modalités de fonctionnement d’une CPRI devraient être fixées dans son règlement intérieur.

Les frais de fonctionnement de la commission, la participation de ses membres aux réunions et la formation de ceux-ci, ainsi que l’indemnisation des représentants salariés seraient exclusivement financés par les crédits versés par le fonds paritaire de financement du paritarisme au titre de la gestion paritaire (contribution des entreprises et subvention de l’État). Un décret en Conseil d’État devrait fixer les modalités selon lesquelles les crédits versés par le fonds financeront les frais de fonctionnement des CPRI.


B) Aménagements relatifs aux institutions représentatives des salariés déjà existantes

Si pour les entreprises de moins de 11 salariés, une nouvelle forme de représentation est instaurée via la création des CPRI, s’agissant des institutions du personnel dans les structures de 11 à 49 salariés, le projet de loi ne prévoit aucun changement.

En revanche, dans les structures de plus de 50 salariés, l’information/consultation du CE est réformée, et regroupée en 3 thèmes : les orientations stratégiques de l’entreprise; la situation économique et financière de l’entreprise; la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi, l’employeur devant s’appuyer sur la Base de Données Economiques et Sociales mise en place.

Le fonctionnement du CHSCT est également impacté par la loi (délais de consultation, durée des mandats).

Nous reviendrons sur ces évolutions une fois que la loi sera promulguée.
 

 II - Rénovation de la négociation collective

1°) Négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical

L’un des objectifs du projet de loi est de faciliter la négociation collective. Il modifie ainsi notamment le mode dérogatoire de négociation institué par l’article L. 2232-21 du code du travail.

Dans la CCNS, l’article 2.4 permet déjà, conformément au Code du travail, une négociation collective, même en l’absence de délégué syndical.

En effet, il est déjà possible de négocier des accords collectifs d’entreprise ou d’établissement entre l’employeur (ou son représentant) et les représentants élus du personnel au Comité d’Entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, dans les entreprises de moins de 200 salariés et en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise ou l’établissement, ou de délégué du personnel désigné comme délégué syndical dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Actuellement, ce sont donc nécessairement des élus qui peuvent jouer un rôle de négociation. En l’absence d’élus du personnel, il peut s’agir de salariés mandatés par un syndicat (article L. 2232-24 et suivants du Code du travail).

Le projet  de loi réorganise les possibilités de négocier avec des élus :

  • la négociation s’engagerait en priorité avec des élus mandatés à cet effet par une organisation syndicale représentative dans la branche dont relève l’employeur ou, à défaut, par une ou plusieurs organisations représentatives au niveau national et interprofessionnel. Une même organisation ne pourrait mandater qu’un seul salarié et seulement pour une négociation, au cas par cas ;
  • à défaut d’élus mandatés, l’employeur pourrait négocier, comme c’est déjà possible actuellement, avec un élu non mandaté ;
  • dans le cas où aucun élu ne souhaiterait négocier, l’employeur pourrait négocier avec un salarié non élu mandaté par l’une des organisations syndicales de salariés précitées.

 En pratique, l’employeur devrait informer de sa décision d’ouvrir une négociation :

– les représentants élus du personnel, par tout moyen permettant de lui conférer une date certaine;

– les organisations syndicales représentatives dans les branches dont relève l’entreprise, ou, à défaut, les organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel.

 Les représentants élus qui souhaiteraient négocier auraient un mois pour faire part de leur choix de négocier ou non, et dans quel cadre (mandatement ou non). À l’issue du délai d’un mois, la négociation s’engagerait avec le ou les salariés mandatés, ou, à défaut, avec un salarié élu non mandaté.

 Objet de la négociation

La négociation avec des élus mandatés pourrait porter sur tout sujet.

En revanche, la négociation avec un élu non mandaté ou un salarié mandaté resterait limitée aux mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif (essentiellement sur l’aménagement du temps de travail), à l’exception des accords collectifs dits de méthode en cas de plan de sauvegarde de l’emploi.

Validité de l’accord collectif

Il conviendra de distinguer les accords selon les parties qui les ont négociés.

-       - Pour être valide, l’accord négocié avec des élus devrait être conclu par des membres titulaires représentant la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles.

-      -  Pour les accords négociés avec un salarié non élu mandaté, un référendum serait organisé dans l’entreprise, comme dans le droit actuel, avec une approbation de 50% des suffrages requise.

-       - Concernant la validité d’un accord conclu avec des élus mandatés, la conclusion sera possible avec des élus qui représentent plus de 50% des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles).

 
Dans les entreprises à la fois dépourvues de délégué syndical et où un PV de carence établit l’absence de représentants élus du personnel, la possibilité de conclure des accords collectifs avec des salariés mandatés est donc maintenue. Dans ce cadre, le mandatement pourrait s’ouvrir à un délégué syndical de la branche, ou, nouveauté, par une organisation syndicale représentative au niveau multi-professionnel ou interprofessionnel.

Ce mode de négociation s’appliquerait aussi de droit dans les entreprises de moins de 11 salariés.

Les salariés pourraient être mandatés par une ou plusieurs organisations représentatives dans la  branche, ou, à défaut, ce qui est nouveau, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel.


2°) Des négociations obligatoires regroupées

Pour les entreprises où sont présentes des sections syndicales, le projet de loi réforme également le droit de la négociation collective, les négociations obligatoires et les thèmes abordés, via un regroupement des négociations par thème.
 

Attention : ce texte n’est pas définitif. Il est encore susceptible d’évolution après son examen par le Sénat.

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